Paris, le 14 novembre 2023.

Le projet de loi « Pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration » sera adopté en première lecture par un vote solennel du Sénat ce mardi 14 novembre avant sa transmission à l’Assemblée nationale dans les prochains jours. Alors que la majorité sénatoriale a considérablement accentué la gravité d’un texte déjà très préoccupant, plus de 30 associations, collectifs et syndicats appellent à un sursaut général des forces citoyennes et politiques pour la défense de l’État de droit et de la dignité humaine.

Engagées depuis plus d’un an dans le suivi de cet énième projet de loi « asile et immigration », nos organisations redoutaient fortement l’examen de ce texte par le Sénat. Alors que nous avions compris depuis longtemps que ce texte n’avait plus de prise avec la réalité du fait migratoire et des conditions de vie des personnes exilées dans notre pays, un nouveau pallier de la déraison a été franchi lors de l’examen par le Sénat.

La majorité à la chambre haute a déposé et adopté un grand nombre d’amendements, tous plus répressifs les     uns que les autres, tout en multipliant les outrances et propos stigmatisants à l’égard des personnes migrantes.  Aucune mesure pouvant « rendre la vie impossible » aux personnes exilées n’a été épargnée, conformément aux ambitions de longue date du ministre de l’Intérieur.

La suppression de l’aide médicale d’Etat (AME), l’une des maigres aides sociales à laquelle les personnes « sans-papiers » ont droit, en est bien sûr un des exemples les plus aberrants et consternants. Mais l’exclusion des personnes sans titre de séjour du droit à l’hébergement d’urgence et du droit à la réduction tarifaire des transports est tout aussi brutale. Bien d’autres barrières rendant plus difficiles l’accès à un séjour digne dans notre pays ont été méticuleusement édifiées : attaques contre le droit à la vie familiale via le regroupement, la réunification ou les titres de séjour pour ce motif ; contrôle accru de l’immigration étudiante ; nouveaux motifs pour refuser ou retirer un titre de séjour ; instauration de quotas migratoires ; rétablissement du délit de « séjour irrégulier ». Même chose pour le passage à cinq ans de résidence stable et régulière pour l’obtention de prestations sociales, qui ne fera que freiner l’insertion, en particulier des familles et des femmes.

La droite sénatoriale, avec le soutien des centristes, a augmenté de manière draconienne les exigences pour accéder au séjour et à la  nationalité : niveau de maîtrise de la langue française accru, « assimilation à la communauté française », respect des principes de la République, limitation des renouvellements de carte de séjour temporaire, etc. Même les arguments les plus utilitaristes, tels que les besoins de main d’œuvre dans les métiers dits en  tension, n’auront pas suffi à faire flancher leurs positions.

Leur acharnement, ainsi que celui du gouvernement, a été sans pareil concernant l’enfermement et l’expulsion des personnes exilées, pourtant déjà largement facilités par le projet de loi initial. L’intervention du juge des libertés et de la détention a ainsi été reculée de deux à quatre jours en rétention, permettant dès lors l’expulsion de personnes sans une décision judiciaire sur la légalité de l’interpellation et le respect des droits. Le texte a sanctuarisé « la double  peine », poursuivi le travail de mise à mal des catégories protégées contre les mesures d’expulsion et est même allé jusqu’à mettre fin aux protections contre les obligations de quitter le territoire français. Les demandeurs d’asile pourront eux aussi se retrouver en rétention avant l’enregistrement de leur demande selon ce texte. Malgré une minorité parlementaire soucieuse du respect de la dignité des personnes exilées dans notre pays, l’examen du Sénat a fait sauter des digues que nous pensions jusque-là infranchissables. Loin d’empêcher ce défouloir répressif, le gouvernement l’a tantôt encouragé en déposant lui-même certains amendements déshumanisants, tantôt laissé faire par des mal-nommés avis de « sagesse » qui ont permis un déferlement de restrictions des droits existants.

Nos associations, collectifs et syndicats ne peuvent se résoudre à ce qu’une partie de la représentation nationale se prête à un acharnement aussi déraisonné que dangereux pour les personnes exilées. Face aux fantasmes auxquels une majorité de sénateurs et sénatrices a donné libre cours, nous appelons les citoyens et citoyennes à se mobiliser et les député·es à un sursaut de lucidité pour que le seul cap à tenir soit celui de l’humanité, de la dignité et de l’égalité des droits.

Organisations signataires

Anafé, ANVITA, ARDHIS, CCFD-Terre Solidaire, Centre Primo Levi, Cimade, CRID, Collectif des travailleurs sans-papiers de Vitry-sur-Seine (CTSPV 94), Dom’asile, Droit à l’école, Emmaüs France, FASTI, Fédération de l’Entraide Protestante (FEP), Forim, Groupe Accueil et Solidarité (GAS), Gisti, Humanity Diaspo, J’accueille Singa, JRS-France, Ligue de l’Enseignement, LDH, Médecins du Monde (MDM), Observatoire international des prisons – section française (OIP-SF), Pantin Solidaire, Paris d’Exil, RESF93, Secours Catholique Caristas France, Sidaction, SINGA, Solidarité Asie France, Thot, Tous migrants, Union des Étudiants Exilés, Union syndicale Solidaires, UniR, Utopia56.

Rassemblement devant le Ministère de l’Intérieur dans le 20e

Communiqué du Collectif Asile Île-de-France

En 2022, 56 179 personnes exilées ont obtenu le statut de réfugié en France. Malgré une protection obtenue après un long parcours difficile et épuisant, les difficultés administratives continuent pour les personnes venues chercher refuge en France.

L’une de ces difficultés est l’Administration Numérique pour les Étrangers en France (ANEF), une plateforme qui doit permettre aux personnes réfugiées, depuis le 2 mai 2022, d’obtenir leur titre de séjour dans le délai de 3 mois imposé par la loi et, en attendant sa fabrication, une attestation de prolongation d’instruction (API) valant droit au séjour.

Or, le collectif Asile Île-de-France constate chaque jour que de nombreuses personnes réfugiées, et les membres de leur famille pouvant prétendre à une carte de résident, n’arrivent pas à obtenir la délivrance de l’attestation de prolongation d’instruction ou son renouvellement.

Les conséquences pour les personnes sont considérables : perte d’emploi, de revenus, de logement, de droits sociaux comme le RSA ou l’APL, etc.

De plus, cette procédure totalement dématérialisée s’impose aux personnes réfugiées. Aucun accès physique n’est prévu dans les locaux de préfectures, ce qui accentue les difficultés pour celles et ceux éloignés du numérique.

L’impossibilité de se rendre physiquement sur place pour résoudre ce problème est accentuée par l’absence de réponse de l’administration aux messages envoyés, ce qui rend le service public inefficace.

Face à ces difficultés rencontrées par les personnes accompagnées dans nos permanences, plusieurs de nos associations ont interpellé l’administration sans obtenir de solution satisfaisante.

À l’occasion de la Journée mondiale des réfugiés, le collectif Asile Île-de-France interpelle de nouveau l’administration et lui demande fermement :

  • l’application de la décision du Conseil d’État du 3 juin 2022 qui impose à l’administration de proposer une alternative aux personnes qui n’ont pas accès au numérique, notamment un accueil et un accompagnement physique dans les préfectures ;
  • que les réfugiés et les membres de leur famille reconnus comme bénéficiant de la même protection obtiennent automatiquement et immédiatement un document attestant de la régularité de leur séjour, afin de mettre fin à leur précarité administrative ;
  • que des instructions claires soient données aux différents organismes (CAF, assurance maladie, établissements bancaires, pôle emploi, etc.) afin d’assurer la continuité des droits des personnes réfugiées ;
  • enfin, que les autorités prennent en compte l’ensemble des dysfonctionnements actuels de l’ANEF, en contradiction avec la loi, et qu’elles les règlent sans délai.

Pour faire entendre la voix des personnes réfugiées, le collectif Asile Île-de-France invite le plus grand nombre de personnes à se mobiliser lors d’un rassemblement le mardi 20 juin, à 18h, près du Ministère de l’Intérieur, à l’angle Rue des Pyrénées et rue Mounet-Sully (75020), pour dénoncer l’abandon administratif des personnes réfugiées et rappeler l’importance fondamentale de respecter et de protéger les droits fondamentaux de chaque individu, indépendamment de son pays d’origine.

Rassemblement devant le Ministère de l’Intérieur dans le 20e

Mardi 20 juin de18h à 20h

A l’angle Rue des Pyrénées et rue Mounet-Sully (75020) (M°1 – Porte de Vincennes ou M°9 – Maraîchers )

Signatures :

  • ACAT-France
  • ATMF
  • CEDRE – Secours Catholique
  • Centre Primo Levi
  • La Cimade 
  • COMEDE
  • Dom’Asile
  • GAS
  • GISTI
  • JRS-Ffrance
  • Solidarité Jean Merlin

Communiqué de la Coordination Française pour le Droit d’Asile

Paris, mardi 7 juin 2022

Près de 5 millions de personnes ont fui l’Ukraine pour l’Europe en trois mois, dont une centaine de milliers sont arrivées en France, suscitant un mouvement de solidarité exceptionnel et une mobilisation inédite de l’Etat et des collectivités. Mais alors que certaines d’entre elles sont accueillies à bras ouverts, d’autres sont désormais sommées de quitter la France.

Adoptée en urgence par les Etats de l’Union européenne au début de la guerre, la décision d’accorder la « protection temporaire » aux personnes ayant quitté l’Ukraine avant le 24 février n’est, en France, appliquée pour l’essentiel qu’à celles et ceux qui ont la nationalité ukrainienne. Elle permet à ses quelque 80 000 bénéficiaires de travailler, de percevoir une allocation, d’apprendre le français, d’être soignées ou de demander un logement social.

Mais d’autres sont laissées pour compte en raison d’une interprétation restrictive des textes européens relatifs à la protection temporaire. C’est le cas des personnes de nationalité ukrainienne qui étaient déjà présentes en France avant le début de la guerre. Mais c’est la situation des personnes étrangères (arméniennes, algériennes, congolaises, ivoiriennes ou russes), qui travaillaient, étudiaient ou étaient en cours de demande d’asile en Ukraine, qui est aujourd’hui la plus préoccupante. Alors qu’elles ont dû fuir les combats et la destruction de leur lieu de vie, on leur reproche de ne pas produire le document de séjour qu’elles possédaient dans ce pays, ou on leur indique qu’elles peuvent retourner dans leur pays d’origine de façon « sûre et durable ». Après un séjour toléré d’un mois, si elles n’ont pas formulé de demande d’asile -demande dont le sort est incertain – ces personnes commencent à recevoir des obligations de quitter le territoire français.

Le traitement différencié dont font l’objet ces personnes, qui vivent les mêmes traumatismes de l’exil, de la séparation et de l’incertitude de l’avenir que celles qui ont nationalité ukrainienne, est inacceptable. Au nom de quoi leur refuser de trouver, comme les Ukrainiennes et Ukrainiens, protection et répit en France ? Pour nombre d’entre elles, un retour dans leur pays d’origine mettrait en péril la continuité de leur parcours universitaire ou de leur vie professionnelle et signifierait la fin d’une perspective de vie pour laquelle ils ont durement investi. C’est un gâchis humain mais aussi un non-sens politique puisque leurs compétences universitaires et professionnelles ont toute leur place en France. Comment ne pas voir le risque que ces personnes demeurent sur notre sol, contrainte à l’irrégularité et à la précarité du fait de cette absurdité bureaucratique ?

Cette logique du « deux poids deux mesures » est d’autant plus incompréhensible et injuste que d’autres Etats européens, comme l’Allemagne ou l’Espagne, ont octroyé la protection temporaire à toutes les victimes de l’invasion de l’Ukraine, sans considération du titre de séjour qu’elles y détenaient. Pourquoi la France ne s’alignerait-elle pas sur ces pays, qui accueillent pourtant plus de réfugiés en provenance d’Ukraine ?

La Coordination française pour le droit d’asile (CFDA) demande au ministre de l’Intérieur une application non discriminatoire de la protection temporaire, en appliquant le plus largement possible la décision européenne du 4 mars 2022 ou, comme le permet la loi, en élargissant les catégories bénéficiaires. Allons au bout du puissant élan de solidarité qui a marqué la réaction de la France à la crise ukrainienne. Ne laissons pas perdurer une situation ubuesque et inacceptable, qui frappe, après l’exil qu’elles ont déjà subi, des centaines de personnes privées d’accueil au prétexte qu’elles n’ont pas la bonne nationalité.

Le 29 mars dernier, nous, associations œuvrant pour l’accueil digne des personnes exilées, appelions les pouvoirs publics à garantir un accueil digne et inconditionnel pour tous·te·s. Nous proposons aujourd’hui à la future Assemblée nationale de s’engager dans cette voie, en adoptant dès son élection des mesures immédiates et durables pour l’accueil des personnes exilées, dont les arrivées n’ont pas vocation à diminuer dans les prochaines années.

Les mesures exceptionnelles mises en place pour accueillir les personnes fuyant la guerre en Ukraine, conjuguées à un élan de solidarité inédit, sont salutaires. Début mai, elles ont permis à 70 000 personnes d’être accueillies en France et de bénéficier d’un accès facilité à leurs droits sociaux et à l’hébergement. Cependant, toutes les personnes exilées doivent pouvoir bénéficier de conditions d’accueil à la hauteur de leurs besoins de protection.

Les conditions de vie des personnes en demande d’asile et réfugiées en France, et particulièrement en Île-de-France, sont alarmantes et illustrent l’insuffisance de nos politiques d’accueil et d’intégration. Chaque jour, nous, associations, accompagnons inconditionnellement les personnes exilées pour pallier les carences des politiques d’accueil. Candidat·e·s aux élections législatives, nous vous appelons à porter la dignité de l’accueil des personnes exilées à l’Assemblée nationale !

Garantir l’accès aux droits

Dernier en date, le rapport Les oubliés du droit d’asile montre que l’accès aux conditions matérielles d’accueil (CMA) – un droit pour les personnes demandant l’asile en France – est constamment entravé. Les CMA ne permettent pas de couvrir les besoins des demandeur·euse·s d’asile, les obstacles à leur obtention et les retraits sont de plus en plus nombreux. Cette situation a déjà valu à la France une condamnation par la Cour européenne des droits de l’Homme pour traitements inhumains et dégradants en juillet 2021. Nous demandons à la future Assemblée nationale de faire évoluer le cadre législatif pour retirer la possibilité d’interrompre totalement les conditions matérielles d’accueil.

Nous demandons également aux futur·e·s député·e·s d’améliorer l’accès aux formations professionnelle et universitaire pour les demandeur·euse·s d’asile et les réfugié·e·s, et d’autoriser tous·te·s les demandeur·euses d’asile à travailler dès le dépôt de leur demande.

Des cours de français financés par l’Etat doivent être rendus accessibles gratuitement aux demandeur·euse·s d’asile dès l’enregistrement de leur demande ; le recours à l’interprétariat doit par ailleurs être systématisé pour l’ensemble de leurs démarches.

Les droits des demandeur·euses d’asile doivent être connus et respectés. L’ensemble des acteurs·trices intervenant auprès d’elles et eux (professionnel·les de santé ou du social, collectivités locales, policier·es et gendarmes…) doivent être formé·es et disposer des moyens suffisants pour les informer.

Assurer des conditions dignes d’hébergement

Les parcours de rue qui résultent des difficultés d’accès à un toit entravent les personnes exilées dans l’ensemble de leurs démarches, y compris une fois la protection obtenue.

La future Assemblée nationale doit voter en urgence l’augmentation de la capacité du parc d’hébergement de plusieurs dizaines de milliers de places en France, dans le cadre d’une programmation pluriannuelle intégrant les perspectives d’évolution de la demande d’asile. Les futur·e·s parlementaires ont le pouvoir de mettre en place un dispositif d’hébergement d’urgence, de réinsertion sociale et de logement social digne et inconditionnel.

Permettre à tous·te·s un accès immédiat aux soins

Fin 2019, des barrières supplémentaires à l’accès aux soins ont été imposées aux étranger·e·s précaires sans papiers pour pouvoir accéder à l’Aide médicale de l’Etat (AME). Dans le même temps, les personnes demandeuses d’asile se sont vu opposer, et pour la première fois, un délai de carence de 3 mois retardant d’autant leurs accès aux soins et leur affiliation à la Protection universelle maladie (PUMa).

Dès 2022, les député·e·s doivent abroger ces délais et barrières à l’accès aux soins qui ont eu des conséquences directes sur la santé de personnes déjà particulièrement précarisées, et travailler à l’intégration des bénéficiaires de l’AME dans le régime général de la Sécurité sociale.

Porter au niveau national et politique l’ambition d’un accueil digne pour tous·te·s

Nous, associations, aidants solidaires, chercheur·se·s, universitaires, attendons de l’Assemblée nationale qu’elle prenne la mesure de ces enjeux. Son entrée en fonction le 22 juin prochain sera l’opportunité de répondre par des mesures immédiates et durables à la situation des personnes exilées en grande précarité, et de proposer un dispositif d’accueil digne.

Signataires : associations

Anne ARGAUD, secrétaire générale de Watizat
Jean-Marc BERNARDINI, président et Co-fondateur et Hanaë EL BAKKALI, cofondatrice de Le Chêne et l’Hibiscus
Fanélie CARREY-CONTE, secrétaire générale de la Cimade
Alain CHRISTNACHT, président du Samu Social de Paris
Nicolas DELHOPITAL, directeur de Famille France-Humanité
Bérénice GEOFFRAY, présidente de Thot
Valérie HANOTTE, présidente Ile-de-France du Secours Catholique – Caritas France
Rima HASSAN, présidente de l’Observatoire des camps de réfugiés
Nicolas LAUREAU, membre du collectif Pantin Solidaire
Romain PRUNIER, membre du bureau de United Migrants
Yann MANZI, délégué général d’Utopia 56
Jacques MERCIER, président de Dom’Asile
Pierre MICHELETTI, président d’Action Contre la Faim
Daniel NAUD, président de la Fondation de l’Armée du Salut
Aurélie RADISSON, directrice du CEDRE – Secours Catholique – Caritas France
Hélène RAMAJO, présidente de Causons
Antoine RICARD, président du Centre Primo Levi
Emmanuelle RINN, trésorière de La Gamelle de Jaurès
Camila RÍOS ARMAS, fondatrice et directrice d’UniR Universités & Réfugié.e.s
Dr. Carine ROLLAND, présidente de Médecins du Monde
Guillaume ROSSIGNOL, directeur de JRS France
Oriane SEBILLOTTE, co-présidente de Paris d’Exil
Antoine SUEUR, président d’Emmaüs France
Khater YENBOU, directeur de La Chorba

Collectif Diakite
Fédération Etorkinekin Solidarité Migrants
Fonds Riace
Light Towards Future
Solidarité Migrants Wilson
Tous migrants

Universitaires et chercheur·ses :

Michel AGIER, directeur de recherche, Institut de recherche pour le développement et EHESS
Karen AKOKA, chercheuse CRJF et ISP
Anne-Laure AMILHAT SZARY, professeure de géographie Université Grenoble-Alpes
Christelle AVRIL, sociologue, EHESS, membre de l’ICM
Virginie BABY-COLLIN, professeure, Aix Marseille Université
Frédéric BALLIÈRE, sociologue, chercheur associé au CURAPP-ESS (UMR 7319), IC migrations
Marie-Laure BASILIEN-GAINCHE, professeure de droit public, ICM
Marianne BLIDON, CRIDUP
Edward BLUMENTHAL, maître de conférences Département LEA – UFR LLCSE
Amélie BOUHEBENT, DU Action sociale et migrations, l’ICP Rennes
Sébastien BOULAY, maître de conférences, Université de Paris – Faculté Sociétés et humanités CEPED
Chiara BROCCO, anthropologue et chercheuse, IMAF
Céline CANTAT, Sciences Po Paris
Geneviève CORTES, professeure, Université Paul-Valéry de Montpellier
Guillaume DAUDIN, professeur des Universités en Économie Université Paris Dauphine-PSL
Soazig DOLLET, doctorante en science politique, CEE SciencesPo Paris
Morgane DUJMOVIC, Migreurop, ICM
Didier FASSIN, Institut d’étude avancée de Princeton, École des hautes études en sciences sociales
Caroline GALLEZ, directrice de recherche, Université Gustave Eiffel
Camille GARDESSE, maîtresse de conférences, Ecole d’Urbanisme de Paris – Lab’Urba
Estelle D’HALLLUIN, maîtresse de conférences, Nantes Université
Myriam HOUSSAY-HOLZSCHUCH, professeure de géographie laboratoire PACTE
Thomas LACROIX, chercheur au CNRS
Hélène LE BAIL, chercheuse CNRS Sciences Po
Nicolas LE BORGNE, doctorant en géographie, Université Paris Est
Stéphanie LIMA, maîtresse de conférences, INUC Albi, LISST Université de Toulouse
Clément LUCCIONI, doctorant, Laburba, Université Paris Est
Carola MICK, Université Paris Cité, MIGRINTER
Marie MONCADA, chercheuse Sciences Po CEE et CNRS
Claire NAIDITCH, chercheuse en économie LEM-CNRS
Chloé OLLITRAULT, doctorante en sociologie, EHESS
Emma PELTIER, doctorante Université Gustave Eiffel
Jeremy PERELMAN, professeur associé, directeur de la clinique de l’Ecole de droit de Sciences Po
Véronique PETIT, enseignante-chercheuse en démographie et anthropologue
Laetitia POUILLOT, Université Bretagne Sud
Faly RAZAFIMBELO, DU Action Sociale et Migration ICP
r-e-s-o-m-e
Isabelle RIGONI, maîtresse de conférences, Centre Emile Durkheim
Lilite ROSSIGNOL, doctorante LVMT Université Gustave-Eiffel
Pablo RUNET, doctorant Laburba, Université Paris Est
Fred SALIN, doctorant EHESS
Carolina SANCHEZ BOE, chercheuse, Université Paris Descartes
Serge SLAMA, professeur de droit public, Université Grenoble-Alpes, CRJ
Nadège SOUBIALE, maîtresse de conférences, Université de Bordeaux Montaigne Stéphanie TCHIOMBIANO, maîtresse de Conférence P1 Panthéon Sorbonne
Hélène THIOLLET, chargée de recherche au CNRS, enseignante à Sciences Po Paris et l’EHESS
Romain TINIÈRE, professeur de droit public à l’université Grenoble-Alpes
Andréa TORTELLI, psychiatre, Pôle GHU psychiatrie précarité Paris et chercheuse, INSERM
Lola TRAVERSON, chargée de projet Centre Population et Développement, IRD
Elsa VALLOT, doctorante, USC (Los Angeles)
Catherine WIHTOL DE WENDEN, directrice de recherche CNRS
Emeline ZOUGBEDE, chercheuse CNRS et ICN

Communiqué de presse inter-associatif – Paris, le 29 mars 2022

Depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie, nous avons été témoins de nombreux discours de solidarité, d’appels aux dons et de mesures exceptionnelles pour accueillir les personnes fuyant la guerre en Ukraine. Dans les pays européens limitrophes, mais aussi en France, l’accueil s’organise, et les Etats se préparent à l’arrivée d’exilé·es ukrainien·nes de plus en plus nombreux·ses. Cette mobilisation est salutaire. Nous, associations œuvrant à l’accueil des personnes exilées, faisons tout notre possible pour accueillir dignement les personnes affectées par cette guerre et poursuivrons nos efforts aussi longtemps qu’ils seront nécessaires.

Nous saluons l’activation de la protection temporaire par l’Union européenne dans le cadre de cette guerre. Nous regrettons qu’elle ne l’ait pas été pour protéger les personnes fuyant massivement des conflits armés par le passé (Syrie, Afghanistan, …), malgré les demandes récurrentes des associations. De la même manière, nous regrettons le choix de la France de n’accorder automatiquement ce régime de protection qu’aux ressortissant·e·s ukrainien·ne·s et aux personnes reconnues comme réfugiées en Ukraine. Nous souhaitons, au contraire, qu’elle soit étendue à toutes les personnes fuyant cette guerre. 

Nous nous réjouissons que ce régime exceptionnel, tel que nous le voyons à l’œuvre à Paris, soit en adéquation avec les recommandations formulées par nos associations et acteur·rices de terrain depuis plusieurs années : l’installation dans le pays de son choix, une facilité d’accès à l’hébergement, un accès à la santé immédiat, le droit de travailler, l’ouverture d’une allocation financière sans délai et la gratuité des transports. Ces conditions de premier accueil doivent être garanties à toutes les personnes en besoin de protection. Dernier en date, le rapport Les oubliés du droit d’asile, met en lumière les conséquences désastreuses d’une politique d’accueil lacunaire sur les personnes exilées. Block: Texte + ImageTexte

Dans ce contexte, nous nous interrogeons sur les conditions de pérennisation des mesures aujourd’hui mises en place et l’impact de cette mobilisation exceptionnelle sur les autres dispositifs d’accueil. Si ce nouvel élan d’accueil est insuffisamment soutenu financièrement, les dispositifs destinés aux exilé·e·s fuyant la guerre, qui relèvent de la compétence de l’Etat, continueront de reposer très largement sur des bénévoles et des professionnel·le·s de structures d’accueil déjà fortement sollicitées. Par ailleurs, le sous-dimensionnement des capacités d’accueil des demandeurs·ses d’asile en région parisienne contraint déjà environ 500 personnes exilées à survivre en campements et 800 personnes à habiter en squat. Nous craignons en outre que les listes d’attente des structures orientant les personnes vers ces solutions d’hébergement et d’accompagnement s’allongent de manière conséquente.  

Pour que la mise en place d’un accueil digne soit la règle dans notre pays et ne reste pas une mesure d’exception, nous appelons les pouvoirs publics, l’Etat et les collectivités locales, à sortir d’une politique d’urgence et de réaction. Les dispositifs mis en place pour accueillir les personnes fuyant la guerre en Ukraine témoignent de la possibilité d’offrir un accueil digne pour toutes et tous. Des mesures immédiates et durables doivent être prises dans le respect des engagements internationaux de la France, en faveur de toutes les personnes qui demandent une protection, et ce de manière inconditionnelle.

Liste des associations signataires :


Action contre la Faim
ASILE
Caracol
Causons
COMEDE
Dom’Asile
Droit Au Logement
Emmaüs France
Fondation Armée du Salut
Famille France-Humanité
Fondation Abbé Pierre
Kolone
La Casa Paris
La Chorba
La Cimade Ile-de-France
La Gamelle de Jaurès
Le Chêne et l’Hibiscus
LTF
Médecins du Monde
Médecins Sans Frontières
Nouvelle Page
O-CR (Observatoire des Camps de Réfugiés)
Pantin Solidaire
Paris d’Exil
Première Urgence Internationale
Réfugiés bienvenue
Samusocial de Paris
SAWA
Secours Catholique, Délégation de Paris
Solidarité Migrants Wilson
Thot
UniR
United migrants
Utopia 56
Watizat
Yes we camp


Contact presse :
Maxime KLETHI – Fondation de l’Armée du Salut : 06 23 19 33 01 / maxime.klethi@armeedusalut.fr

Communiqué de presse de l’ODSE – Le 21 mars 2022

La suppression du délai de carence de trois mois pour l’accès à l’assurance maladie des Ukrainiens et Ukrainiennes illustre l’absurdité des décisions prises en 2019-2020 retardant l’accès aux soins et à la santé des personnes en demande d’asile ou en situation précaire de séjour.

Face à la guerre qui sévit en Ukraine, nos associations se félicitent des nombreuses initiatives solidaires et des mesures prises pour faciliter l’accès aux droits et aux soins des personnes fuyant l’Ukraine. [1]

Il est nécessaire que des personnes contraintes de prendre la route de l’exil bénéficient d’un accès à la santé et aux soins adapté à leurs besoins dès leur arrivée en France. Il est heureux que les pouvoirs publics aient décidé de ne pas opposer le délai de carence de trois mois pour accéder à l’assurance maladie aux personnes bénéficiaires de la protection temporaire et aux personnes de nationalité françaises venant d’Ukraine. Mais cette mesure illustre a contrario l’injustice et la discrimination du choix exactement inverse qu’a fait le gouvernement en 2020 : imposer un délai de carence de 3 mois aux demandeurs-ses d’asile [2] ou encore retarder l’accès à l’Aide médicale de l’Etat [3].

Nos associations avaient vigoureusement dénoncé à l’époque ces décisions [4] . Elles faisaient valoir que retarder ou empêcher l’accès aux soins est un non-sens éthique, sanitaire et économique. L’accès à la santé et aux soins doit être universel et inconditionnel. En créant des obstacles à l’accès aux soins et à la santé d’un public déjà fragilisé, ces mesures pénalisent la santé individuelle, à terme la santé publique ainsi que les services hospitaliers et s’avèrent en définitive plus coûteuse pour les finances publiques.

Les associations membres de l’ODSE demandent que les mesures facilitant à juste titre l’accès aux soins des Ukrainiens et Ukrainiennes s’appliquent à toutes les personnes exilées. Elles demandent la suppression de toute disposition visant à retarder l’ouverture des droits à la santé, en particulier pour toutes les personnes fuyant les persécutions, quelle qu’elles soient et sans discrimination.

[1] « Protection temporaire pour l’Ukraine : encore des efforts pour être à la hauteur des enjeux », Coordination française pour le droit d’asile (CFDA), 18 mars 2022

Notes

[2] Décret n° 2019-1531 du 30 décembre 2019 relatif à la condition de résidence applicable aux demandeurs d’asile pour la prise en charge de leurs frais de santé

[3] En particulier, l’exigence d’une condition d’ancienneté de la situation d’irrégularité du séjour de plus de 3 mois. Article L.251-1 du code de l’action sociale et des familles modifié par la loi de de finances pour 2020.

[4Le gouvernement s’apprête à dégrader la santé des personnes étrangères : le cri d’alarme des associations, ODSE, Emmaüs Solidarité, Fédération des acteurs de la solidarité, France Assos Santé, communiqué, 31 octobre 2019 ; L’Aide médicale d’Etat : un filet de sécurité pour la santé publique à ne pas restreindre, communiqué interassociatif, 6 octobre 2019 ; La mise en danger de la santé des étrangers pour servir une politique migratoire !, annonces du Premier ministre sur l’accès aux soins des personnes étrangères, communiqué, 6 novembre 2019 ; L’accès aux soins des étrangers en France, méthodiquement raboté par le gouvernement, Le Monde, 26 novembre 2020 ; « La réforme de l’aide médicale d’Etat est une triple faute morale, économique et sanitaire », Tribune d’un collectif de plus de 500 professionnels de santé, Le Monde, 16 février 2021

Communiqué de presse – Coordination Française pour le Droit d’Asile – vendredi 18 mars 2022

Les ministres de l’intérieur, de la santé, du logement et de la citoyenneté ont diffusé une instruction conjointe en date du 10 mars 2022 sur l’application de la protection temporaire pour les personnes en provenance d’Ukraine.

Plus de trois millions de personnes ont fui l’invasion du pays par l’armée russe. Les pays d’Europe centrale et orientale en accueillent le plus grand nombre. Parce que la France a une tradition d’asile et parce qu’elle préside le conseil de l’Union européenne pour six mois, elle doit être exemplaire dans la réponse à celles et ceux qui fuient la guerre et les persécutions.

Concernant la protection temporaire, la Coordination française pour le droit d’asile (CFDA) qui avait demandé à plusieurs reprises son application pour les personnes fuyant la guerre civile en Irak, en Libye ou en Syrie, salue son activation pour la première fois en vingt-et-un ans, pour les ressortissant·e·s ukrainien·ne·s et les réfugié·e·s qui résidaient en Ukraine avant le 24 février 2022.

Cependant, les personnes qui ont demandé asile en Ukraine sont exclues de son bénéfice et invitées à solliciter l’asile dans le premier pays européen où leurs empreintes sont relevées, en raison de l’application du règlement Dublin. Quant aux résident·e·s étranger·e·s en Ukraine, la décision du Conseil de l’Union européenne du 4 mars 2022 conditionne l’application de la protection temporaire à l’impossibilité de «retour dans des conditions sûres et durables» dans le pays d’origine. Cette notion, qui n’a pas été clairement définie, est laissée à l’appréciation au cas par cas des préfectures, ce qui fait craindre un traitement inégalitaire des situations d’un département à l’autre. Pour la CFDA, cette notion ne doit pas être restreinte aux seuls risques pour la vie et pour la liberté mais tenir compte de la possibilité ou non de mener une «existence normale», notamment celle possibilité de travailler ou d’étudier [1].

La CFDA demande que la protection temporaire soit étendue à tous les ressortissant·e·s non ukrainien·ne·s qui résidaient en Ukraine et qui ont dû fuir le pays, notamment les personnes qui y ont demandé asile ou y étudiaient, comme le permet la directive européenne sur la protection temporaire.

Concernant l’accueil et l’hébergement, la CFDA salue la mobilisation citoyenne exceptionnelle pour les réfugié·e·s en provenance d’Ukraine et les propositions d’hébergement citoyen. Ce dernier doit être structuré et accompagné et ne peut constituer une réponse pérenne. Les pouvoirs publics doivent organiser un dispositif d’accueil à la hauteur, avec la création massive de places d’hébergement ou de logement, en concertation avec l’ensemble de la société civile mobilisée. Les acteurs institutionnels et associatifs doivent être renforcés pour être en mesure de proposer un accompagnement global, dans la durée, afin d’assurer l’autonomie et l’insertion sociale et linguistique des personnes, ainsi qu’un suivi médical et psychologique. Un pilotage interministériel est nécessaire pour répondre aux besoins globaux des réfugié·e·s.

Concernant l’accès au marché du travail, la CFDA demande une simplification de la procédure pour garantir le droit effectif et rapide au travail.

Concernant les demandes d’asile ou de réexamen des personnes ukrainiennes ou opposantes russes ou biélorusses, déjà présentes en France ou qui viennent d’arriver, elles doivent être enregistrées et examinées dans les meilleurs délais. Les examens des dossiers ne doivent pas être gelés, comme cela semble être le cas à la Cour nationale du droit d’asile. Dans tous les cas, les personnes doivent bénéficier des conditions matérielles d’accueil pour subvenir à leurs besoins.

Concernant les opposants et opposantes à la guerre en Russie, la France doit protéger les personnes qui cherchent en ce moment à fuir la Russie par crainte de persécutions en raison de leur objection de conscience à la guerre d’invasion, notamment en leur délivrant des visas au titre de l’asile dans les consulats français de Russie ou des pays limitrophes.

Pour les personnes ukrainiennes en transit vers le Royaume-Uni, les autorités françaises doivent intervenir auprès du Gouvernement britannique pour qu’elles puissent rejoindre ce pays sans être soumises à un visa.

La solidarité vis-à-vis des personnes qui fuient l’Ukraine doit inspirer la politique publique en matière d’asile. Elle ne doit pas se faire au détriment des demandeurs d’asile et réfugiés d’autres nationalités, en particulier en ce qui concerne l’accès à l’hébergement, les délais d’instruction des dossiers ou l’accès aux droits comme les conditions matérielles d’accueil ou l’assurance maladie.

La Coordination française pour le droit d’asile rassemble les organisations suivantes : Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (ACAT); Avocats pour la défense des droits des étrangers (ADDE); Amnesty International – Section Française; Association pour la Reconnaissance des Droits des personnes Homosexuelles et trans à; l’Immigration et au Séjour (Ardhis); Association d’avocats liés au Conseil Européen pour les Réfugiés et Exilés (Elena-France); La Cimade (Service œcuménique d’entraide); Comité pour la santé des exilés (Comede); Dom Asile; Fédération des Associations de Solidarité avec Tou-te-s les Immigré-e-s (Fasti); Groupe accueil et solidarité (Gas); Groupe d’information et de soutien des immigré.e.s (Gisti); Jesuite Refugee Service (JRS-France); Ligue des droits de l’Homme (LDH); Médecins du Monde; Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (Mrap); Centre Primo LeviSecours Catholique (Caritas France)

Sont également signataires :

  • Association d’Accueil des Demandeurs d’Asile (AADA)
  • Centre d’action social protestant (Casp)
  • Comité meusien d’accueil des demandeurs d’asile (COMADA)
  • Fédération des acteurs de la solidarité (FAS)
  • Fédération de l’entraide protestante (FEP)
  • Forum réfugiés-Cosi
  • France terre d’asile (FTDA)
  • Français langue d’accueil (FLA)