L’adaptation des associations de solidarité face à la crise sanitaire

Face à la crise sanitaire et la fragilisation des personnes en précarité, les associations de solidarité adaptent leur accompagnement et déploient des initiatives conjointes. C’est le cas en Seine-Saint-Denis, l’un des départements les plus frappés par la crise, où de nombreux·euse·s habitant·e·s ont vu leurs revenus amputés par l’arrêt partiel de l’économie. 

Durant le premier confinement, Dom’Asile et le Secours Catholique ont renforcé leurs actions sur le territoire en faveur de personnes précaires. Les deux associations ont conjointement assurer la distribution de chèques services aux personnes en grande difficulté, grâce à l’évaluation de leurs situations sociales. Claire, salariée du Secours Catholique qui accompagne l’équipe locale de Saint Denis Secours et Johanna, bénévole au centre de Dom’Asile Saint-Denis reviennent sur cette expérience.

“Lors du premier confinement, presque toutes les associations de solidarité ont été contraintes de fermer leurs portes. Le Secours Catholique a voulu agir vite avec la remise de chèques services aux ménages les plus en difficulté.” Selon Claire, il ne s’agissait pas seulement d’être dans le distributif, mais aussi de trouver le moyen d’entrer en contact avec les personnes les plus isolées.

La dynamique est aussitôt partagée avec les bénévoles de Dom’Asile, qui ont accepté d’apporter leur soutien dans cette opération pour pallier le manque de moyens humains – toutes les personnes n’étant pas disposées à se déplacer en période de circulation du virus. Tous les 15 jours et pendant toute la durée du confinement, les équipes bénévoles ont sillonné le département à pied, à vélo ou en en voiture afin d’assurer la distribution des chèques services.

Johanna se réjouit de la synergie créée : “Au-delà du renfort de bénévoles, nous avons pu identifier des personnes très vulnérables parmi les exilé·e·s que l’on accompagne habituellement, que l’on réorientait ensuite vers le SCCF pour une évaluation sociale. De nouvelles personnes ont ainsi pu bénéficier de ce dispositif.”

Le dialogue entre les deux associations et leur complémentarité a permis de distribuer plus de 42 800 euros de chèques services à environ 60 familles basées à Saint Denis et dans les villes aux alentours pendant toute la période du premier confinement. 

Jour de la réouverture du centre Dom’Asile de Saint-Denis, en mai 2020
Les accompagnements ont repris depuis, dans le respect des gestes barrières

La crise sanitaire a favorisé la logique d’adaptation des pratiques : le renforcement de la coordination inter-associative au niveau local mais aussi l’expérimentation de l’accompagnement à distance. Dès les premières semaines du confinement, Dom’Asile a mis en place une permanence téléphonique avec l’envoi de sms groupés à l’ensemble des personnes domiciliées. “J’ai eu des appels non stop juste après avoir envoyé les sms, les gens étaient contents, avaient envie de parler, d’être rassurés”, témoigne Johanna.

Selon elle, la distension des liens due à la fermeture des centres de Dom’Asile – perçus par les personnes exilées comme un point de repère – a engendré un manque d’information et beaucoup d’incompréhension sur la situation : “Certains ne savaient pas ce qui était autorisé ou interdit, d’autres s’inquiétaient sur l’arrivée à échéance de leur titre de séjour et n’étaient pas au courant de la prolongation automatique de leurs droits…”

Malgré les aides de l’Etat et les mesures de prolongation de certains droits, de nombreux·eus·es réfugié·e·s sont encore aujourd’hui confronté·e·s à la  suppression de leur revenu lorsqu’ils ne peuvent pas bénéficier du chômage partiel. C’est le cas de Avijit, réfugié Bangladais, domicilié au centre Dom’Asile de Saint Denis : “Je travaillais dans un hôtel en extra, ça se passait très bien mais avec le 1er confinement, mon contrat n’a pas été renouvelé. Je suis toujours sans emploi depuis, je n’ai pas de chômage partiel, je touche seulement le RSA. Ça ne me permet pas de trouver un logement stable. Ça devient très problématique”.

La situation est d’autant plus préoccupante pour les travailleur·euse·s informel·lle·s en situation irrégulière, qui privé·e·s de leurs sources de revenu, n’ont le droit à aucune aide. Ils et elles occupent généralement des emplois dans les secteurs les plus touchés par la crise : la restauration, l’hôtellerie, la vente ambulante, le travail domestique… « Beaucoup de personnes déboutées de l’asile que nous domicilions à Dom’Asile gagnent leur vie grâce aux marchés, qui étaient totalement interdits durant le premier confinement “.

Les activités de Dom’Asile et du Secours Catholique ont repris après le premier confinement, dans le respect du protocole sanitaire en vigueur pour garantir la sécurité des bénévoles et des personnes accompagnées. Aujourd’hui, nos associations continuent à ouvrir leurs portes, le contact régulier et l’accompagnement des personnes précaires dans l’accès à leurs droits sociaux étant plus que jamais nécessaire. La période étant toujours très incertaine, Dom’Asile réfléchit à de nouvelles manières d’accompagner les personnes exilées à distance, avec notamment la création d’outils pédagogiques multilingues pour favoriser l’autonomisation dans leurs démarches administratives.